Avec la complicité d’officiers de l’armée ghanéenne, les conjurés projetaient de prendre le contrôle du gouvernement à l’aide d’un impressionnant arsenal d’armes. C’est finalement une longue opération de filature des forces de sécurité qui a permis de sauver Nana Akufo-Addo du coup d’Etat qui visait à le renverser vendredi dernier. Retour sur un renversement que les autorités annoncent avoir déjoué avant le passage à l’acte.

La cible principale du «complot», le State House, le palais présidentiel. C’est ce cœur battant du pouvoir politique au Ghana que les trois personnes, identifiées comme les cerveaux du coup d’Etat, visaient dans leur tentative de prendre le contrôle du gouvernement. Une tentative mise en échec, selon un communiqué-fleuve signé par le ministre de l’Information, Kojo Oppong Nkrumah, qui revient largement sur les événements. Que s’est-il alors passé?

Longue opération de filature de « Take Action Ghana »

Tout se termine ce vendredi 20 septembre avec l’arrestation d’un médecin, d’un fabricant d’armes local et d’un autre de leurs complices présumés. Pendant quinze mois, les forces de sécurité et les services de renseignement ghanéens ont rondement mené une opération de filature du groupe et de « recueil d’éléments de preuves » entre Accra, la capitale et Bawaleshie (dans la banlieue d’Accra). Outre le matériel électronique, l’arsenal saisi au moment de l’opération contenait des fusils AK-47, des grenades lacrymogènes, des pistolets de fabrication artisanale ou encore des explosifs et des munitions.

Réuni autour d’un mouvement appelé «Take Action Ghana» (TAG, acronyme de « Passer à l’acte au Ghana »), le groupe avait entrepris l’enrôlement de jeunes qu’il souhaitait radicaliser contre « la politique et l’autorité du gouvernement ». Créé en août 2018, TAG avait déjà pris attache avec « un certain nombre de militaires en service et les a incités à ourdir et à exécuter un complot visant à obtenir des armes, à prendre le contrôle d’installations clés et à obtenir un financement pour faire aboutir le projet de prendre les rênes du gouvernement », précise encore le communiqué.

Un coup d’Etat présumé et des questions

A en croire ce dernier, le coup d’Etat, appuyé par deux Ghanéens vivant aux Etats-Unis, consistait en un soulèvement populaire conjointement mené avec une opération qui « visait le palais présidentiel ». Suivis depuis juin 2018, les suspects ont tenu plusieurs réunions au Ghana et établi plusieurs contacts avant que leur projet supposé ne soit définitivement mis en échec. Cependant, plusieurs questions subsistent après l’arrestation des cerveaux présumés de la tentative de coup d’Etat.

Si le gouvernement de Nana Akufo-Addo parle de tentative de « déstabilisation du pays », il ne dit pas encore si le projet devait conduire à l’arrestation, l’enlèvement ou l’élimination physique du président ghanéen. Un grand flou qui s’accompagne d’autres interrogations. Comment trois personnes sans accès reconnu au State House peuvent-elles prendre le lieu de pouvoir le plus gardé de la République ? Les connexions avec des officiers de l’armée, la préparation d’un arsenal d’armes et d’un soulèvement populaire n’expliquent pas tout.

Qui est le véritable bénéficiaire de la prise de contrôle du gouvernement ? L’on a du mal à imaginer que deux expatriés ghanéens vivant aux Etats-Unis peuvent conduire une opération de prise de contrôle du gouvernement ghanéen. Vont-ils être extradés au Ghana ? Quid des militaires complices présumés ? Dans leur communiqué, les autorités laissent entendre que les opérations vont se poursuivre dans le but de rechercher et arrêter d’autres éventuels complices. Sont-elles passées à l’acte trop tôt ou ont-elles surréagi ? On ne saura peut-être pas le fin mot de l’histoire.

 

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