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CE QUE Me Amédée TOUKO PENSE DE LA FIÈVRE « RÉVOLUTIONNAIRE » QUI TRAVERSE LA RÉSISTANCE CAMEROUNAISE INSPIRÉE ET CONDUITE PAR MAURICE KAMTO : L’OPPOSITION ENTRE LE CHANGEMENT DANS LA PAIX ET LE CHANGEMENT PAR LA VIOLENCE

La résistance camerounaise est traversée par un courant certes minoritaire mais audible, porté par de résistants qu’on pourrait qualifier de « bébés-Kamto » révélés à l’occasion du mouvement de résistance, telle qu’inspirée et conduite par Maurice KAMTO ; courant qui, dans une impatience revendiquée, affirme ne plus croire en la démarche pacifique prônée par ce dernier.

Au « changement dans la paix », ils opposent de manière frontale et brutale, la stratégie du néant « brulé-brulé » ou de la lutte armée. Ils congédient désormais la Résistance et s’inscrivent dans une insurrection armée qu’ils qualifient de Révolution.

Une analyse plus fine nous indique que se fédèrent dans cette option dite révolutionnaire des activistes dont l’émancipation quant à la dynamique KAMTO ou une certaine Kamto-dissidence semblaient se décliner dans des insinuations, des silences, des prises de position.

LE CONTEXTE DE LA RÉVOLUTION DU DIVORCE

L’idée de la révolution est portée par un courant dans la Résistance dont la tiédeur du soutien à Maurice KAMTO a pu être relevée en de nombreuses circonstances, certains ne se privant pas de faire écho à des voix dissidentes au MRC et en dehors.

En effet, Maurice KAMTO est depuis quelques années déjà, la personnalité centrale de la vie politique camerounaise, en même temps qu’il apparaît comme la personnalité la plus à même d’accéder au pouvoir. Paradoxalement, de nombreuses figures se réclamant de l’opposition ou de la résistance camerounaise semblent avoir fait de sa ruine politique la priorité majeure ou vitale de leurs démarches.

L’espace politique dans l’opposition apparaît comme entièrement préempté par Maurice KAMTO. La recherche d’oxygène chez certains opposants s’accompagne d’une violence politique dirigée contre lui. La plus retentissante d’entre elles fut sans doute l’assaut du regretté Christian PENDA EKOKA, contre son allié leader de l’opposition, sous le prétexte de divergences, dans le cadre de la gestion de l’initiative Cameroun Survival. Malgré la fragilité et l’inconsistance des insinuations faites contre l’équipe KAMTO, quelques personnalités opportunistes ou individus sans convictions véritables ont cru devoir donner un certain écho à cette cabale. Dans un habile exercice de communication, on a ainsi vu Maître Christian NTIMBANE accuser Maurice KAMTO de n’être pas un « leader sacrificiel ». On a entendu Maître Michèle NDOCKY, reprocher à Maurice KAMTO son omnipotence dans l’opposition, s’insurger contre ce qu’elle appelle l’homme providentiel et l’hyper-présidentialisation… Patrice NGANANG, plus frontalement, lui reprochant de n’avoir pas à l’égard des séparatistes ambazoniens, une certaine proximité idéologique et opérationnelle, le couvre désormais de d’ignobles et méchantes infamies…

Ceux qui aujourd’hui affichent leur différence par l’idée révolutionnaire, sont pour l’essentiel soit des profils ayant servi de relais ou brillé par une certaine complaisance ou silence dans cette entreprise de Kamto-bashing qui a secoué sans toutefois affaiblir la résistance.  En effet, un leader qui se planque quand l’édifice qu’il est supposé bâtir brule, est un pyromane qui se voit.

Désormais, à côté des « Kamto ou Rien » (KOR), « L’Alternance c’est Kamto », ou de ceux qui simplement considèrent que Maurice KAMTO indique le chemin et la voie, se construit un noyau de «Kamto Mais » et de «Tout Sauf Kamto » qui à la Résistance oppose la Révolution.

LE PREMIER PÉCHÉ MORTEL : LA RÉVOLUTION CONTRE LA RÉSISTANCE

L’idée Révolutionnaire dans une faction de la BAS (Brigade Anti-Sardinard), se construit sur un postulat naïf : « on ne combat pas une dictature dans la paix ». Dans cet ordre d’idées, disqualifiant Maurice KAMTO quant à ce que devrait être selon eux la voie idoine, ils annoncent l’avènement d’un leader de la Révolution et dans une inqualifiable maladresse stratégique, à la Résistance, ils opposent la Révolution. Pourtant une simple compréhension des processus Révolutionnaires aurait pu éviter aux tenants de cette thèse, cette errance stratégique.

La résistance, entend s’interroger, dans une dimension critique, sur les conditions de ses possibilités. En d’autres termes, essayer de savoir avec le plus d’honnêteté possible, si la révolution est désirable, c’est-à-dire d’une part si elle est désirable en fait, d’autre part si elle est désirable en droit. 

À cette démarche méthodique, certains activistes vendent la séduction du vacarme de l’agitation révolutionnaire, la fascination de la Révolution «spectatorielle». En effet, la Révolution du point de vue de la manière dont elle est accueillie, représentée, regardée, a toujours suscité un certain enthousiasme chez des Peuples en quête de liberté. 

Pourtant, il s’agit tout à la fois de reconnaître, d’accroitre la légitimité d’un mouvement à travers des actions de soutien et de résistance, afin de nourrir et de valider un soulèvement populaire et donc, de convertir la résistance en « révolution », si ceci s’avère opportun.

En choisissant de manger leur blé en herbe, « les révolutionnaires » ont choisi de se déconnecter de la légitimité Kamtoienne dont ils se sont abondamment abreuvés pour construire leur visibilité et brocardent désormais le « changement dans la paix » de Maurice KAMTO. Ces bébé-Kamto pressés ont donc décidé de mordre le sein qui les a nourris.

DEUXIÈME PÉCHÉ MORTEL : VOULOIR BÂTIR UNE RÉVOLUTION SUR LA RUINE DE L’OPPOSITION POLITIQUE À BIYA

Des impatiences et l’absence de vision partagée sur la trajectoire à suivre génèrent au sein de la résistance camerounaise, des turbulences dont les manifestations s’apparentent à une guerre fratricide. Dans ce magma politique, Maurice KAMTO, le leader de l’opposition, semble être devenu l’enjeu vital : il est célébré et porté en triomphe par d’aucuns qui espèrent par cette démarche lui donner toute la force dont il aurait besoin pour atteindre les objectifs politiques qu’il s’est assignés, et en même temps, attirer vers eux une partie de sa lumière, tout comme il est combattu et réduit par d’autres qui espèrent ainsi attirer les regards ou les égards des Anti-KAMTO et construire sur ses ruines un nouveau leadership de l’opposition, à défaut de pouvoir prendre sa place.

C’est ainsi que sous le prétexte de divergences très souvent superficielles, s’engagent d’inutiles guerres de tranchées dont l’un des mobiles inavoués est la guerre de leadership. Inapte à promouvoir une vraie intelligence de la composition au sein de la résistance camerounaise, on opte pour la paresse intellectuelle et militante, on développe l’intelligence du clivage, on essaye de couper son morceau, de couper sa part de la résistance pour bâtir hâtivement un truc à quoi on donne le nom de baptême de « LA RÉVOLUTION ».

L’absence de réponse sérieuse à la question de l’alternative à KAMTO nous ramène au caractère aventureux de tels positionnements que d’aucuns soupçonnent d’être plus aptes à séduire le pouvoir qu’à aider l’opposition à se consolider. À vrai dire, si pour l’opposition on a un projet plus ambitieux, on le met simplement en œuvre… Pour construire une plus belle maison, on ne détruit pas l’ancienne dans laquelle se trouvent des gens pour les jeter dans les intempéries et l’insécurité avant d’engager le chantier. On construit d’abord la nouvelle et on y met à l’abri sa famille, avant de détruire l’ancienne si besoin.

D’ailleurs, il faut indiquer qu’on n’est absolument pas obligé d’être avec KAMTO ou de le suivre dans sa trajectoire politique. Mais envisager une démarche alternative en insinuant que celle prônée par ce dernier ne marchera pas, signifie du point de vue purement humain, la remise en cause de son intelligence stratégique et de la pertinence du positionnement politique de l’organisation dont il préside aux destinées. Ce qui évidemment induit chez ses partisans, au moins une attitude d’auto-défense et plus encore des questionnements sur les moyens dont disposent ces néo-révolutionnaires pour vaincre l’armée du dictateur Paul BIYA.

L’analyse stratégique ne saurait se réduire à un exercice de divination dans lequel les sécrétions de l’esprit d’un activiste prédiraient l’échec inéluctable de l’entreprise de résistance la plus ambitieuse de ces 30 dernières années et détermineraient l’orientation d’une lutte. À vrai dire, le marasme stratégique et politique qu’inspire cette démarche intrigue profondément tout esprit critique.

TROISIÈME PÉCHÈ MORTEL : UNE SIDÉRANTE DÉMONSTRATION D’UN MARASME STRATÉGIQUE

Les « Révolutionnaires » ambitionnent d’opposer à la barbarie du régime BIYA, une réponse violente armée et indiquent de manière péremptoire que « le changement dans la paix, n’est pas possible ».

La démarche révolutionnaire suppose sur un important soutien populaire. L’engager sur le clivage et le divorce d’avec la force populaire la plus importante de l’opposition incarnée par Maurice KAMTO est une faute stratégique grave. Il me semble en l’état, difficile de construire avant 2030, une force alternative du même niveau que celle portée par Maurice KAMTO.

Par ailleurs, vouloir susciter de l’adhésion en cette période de notre résistance, avec pour leitmotiv, « Kamto a échoué » me semble suicidaire. Sur le plan d’une certaine éthique politique, on ne saurait parler d’échec d’une stratégie qu’on ne connait pas, de même qu’on ne peut constater l’échec avant le terme d’une démarche.

En réalité, les contextes politiques aux apparences semblables, ne sont similaires que pour des esprits non avisés : le contexte de 1960 n’est absolument pas celui de 1990, n’est pas celui de 2018 et ne sera pas celui de 2025. Dire qu’une démarche a échoué alors qu’elle ne s’est même pas encore déployée est regrettable. Le charlatanisme et la voyance du poteau ne remplacera jamais une sérieuse analyse politique.

Le bruit sur les réseaux sociaux, le dévoiement de la stratégie de ceux se réclamant de l’option armée procède de tout, sauf de ce qui gouverne ce type de démarche, qui se fait sous le sceau de la discrétion, de la sobriété et surtout de la consensualité. On ne libère pas un Peuple sans lui, contre lui, malgré lui. Le contexte d’une guerre de libération se prépare et davantage dans un pays où les gens sont encore peu enclins à arracher ce qui leur revient de droit, notamment le droit de manifester librement. Il apparait donc que les colères n’ont pas encore été suffisamment traduites en capacité d’action. Le mouvement sécessionniste anglophone est l’aboutissement de plusieurs décennies de résistance et d’armement moral. L’élément déclencheur est le bâillonnement et le meurtre de sang froid de personnes qui pacifiquement manifestaient, par les forces de répression du régime tyrannique de Paul BIYA.

En outre, la publicité autour de cette démarche laisse plus d’un observateur pantois : Il n’est même pas exclu que la dictature de Yaoundé, au moyen d’agents, finance et prenne le contrôle d’une telle entreprise et lui donne l’orientation la plus à même de lui permettre de garder le pouvoir, ou de neutraliser ces valeureux activistes. Le cas de Guerandi Mbara qui ne manquait pas d’intelligence stratégique en tant qu’enseignant des sciences politiques dans de nombreuses universités et écoles, et qui fut néanmoins enlevé et assassiné par ce pouvoir fou, en est la parfaite illustration.

Penser donc qu’en un temps relativement court, on sera à Etoudi parce qu’on aura pris les armes, ressemble à du gribouillage stratégique. Une stratégie ou démarche dans laquelle les moyens ne sont pas évalués et maîtrisés, dans laquelle la dimension politique n’est pas soignée, dans laquelle les contingences diplomatiques ne sont pas déminées, est simplement inexistante.

Il faut rappeler que les accords militaires entre la France et le Cameroun viennent d’être renouvelés. Depuis son indépendance, le Cameroun a signé avec la France, des accords militaires de deux types : les accords de défense, qui visaient à la fois la défense intérieure et extérieure, offrant la possibilité au Cameroun de faire appel aux forces françaises pour assurer sa défense, et les accords d’assistance militaire technique pour la mise sur pied de l’armée camerounaise.

En attendant le désengagement de la France en Afrique, l’armée française reste positionnée au Tchad et au Gabon. Avis donc aux charlatans révolutionnaires et vendeurs d’illusions.

QUATRIÈME PÉCHÉ MORTEL : UN MODUS OPERANDI TERRORISTE ET CRIMINEL ASSUMÉ

Le fondement de l’action Révolutionnaire ou de la guerre de libération, c’est la légitime défense contre un oppresseur. Cette légitime défense, n’est pas un acte de vengeance. Ce qui suppose que soient réunis des conditions politiques et de fait qui valident l’action violente du Peuple, ou d’une partie de celui-ci. Une répression sanglante de manifestation, une fraude avérée à une élection ou une victoire volée, sont autant d’éléments pouvant fonder la légitimité d’une défense. Pour cela, il faut préparer assidument le terrain politique par une vigoureuse action de résistance.

La guerre à priori n’est pas de l’ordre de la légalité. Avant que ne s’impose dans l’opinion une situation de fait résultant d’un conflit armé, le bon droit à toute guerre civile est précédé par une phase dans laquelle les belligérants civils sont considérés et traités comme des délinquants, des criminels. Ils ne peuvent donc pas bénéficier des protections des lois internationales. Des procédures judiciaires contre eux peuvent être ouvertes par des gouvernants qui, sous le prétexte de la légalité de leur existence, obtiennent des États qui hébergeraient des auteurs ou complices des crimes invoqués, qu’ils soient interpelés, jugés ou extradés. Ce fut le cas des leaders anglophones Camerounais exilés au Nigeria.

Ceux donc qui sur les réseaux sociaux, échafaudent naïvement sous le regard de la terre entière des projets de destruction (brulé-brulé), ou de guerre, tombent sous le coup des lois pénales internationales et peuvent être interpelés et jugés n’importe où, car en l’occurrence, les qualifications qui pourraient être retenues contre eux sont celles prévues par les lois internationales dont celle du TERRORISME : Emploi systématique de la violence pour atteindre un but politique (attentats, destructions, prises d’otages…).

Aucun groupe sérieux qui opterait pour une révolution armée,  ne viendrait le faire sur la place du marché. Le vaste folklore qui se déroule sur les réseaux sociaux est une curiosité comme ce pays sait en produire, c’est de la fanfaronnade Camerounaise. Non ! Ces choses ne se passent pas comme ça. Jamais on n’a vu ainsi revendiquer des actes qui sont du registre criminel. D’aucuns pourraient penser qu’il s’agit d’actes de bravoure et de courage… Un leader qui se livre n’est pas un leader courageux, c’est un aventurier car en réalité, toute l’entreprise de « libération » qu’il ambitionnera de bâtir sera démantelée au premier acte de de son exécution. La vérité étant que dans tout État normal, une fois qu’on affiche aussi ostentatoirement des velléités de violence en bandes organisées, on fait l’objet de surveillance immédiate et continue.

Dans cette aventure, étant donné que les promoteurs de cette démarche violente assumée et ouverte, font de manière tout aussi transparente des appels de fonds dans l’optique de financer leur entreprise « Révolutionnaire », la chaîne des responsabilités qui inéluctablement sera établie en cas du premier acte de violence sur le territoire camerounais, assurément impliquera les complices qui en connaissance de cause auraient financé les crimes ou actes de terrorisme perpétrés. L’utilisation de ces expressions est faite à dessein parce que c’est ainsi que seront qualifiés ce qui pour certains, seraient des actes de légitime défense.

Conclusion 

La colère découlant des injustices au Cameroun doit être le ciment de l’action militante. Elle ne doit pas nous isoler les uns des autres, malgré toutes les forces œuvrant en ce sens.

Ces injustices ont pour principale principal objectif, d’atomiser la société, de briser les liens qui nous unissent et nous permettent de nous mobiliser. Elles nous plongent dans une jungle où la solidarité devient une chimère. Nous devons retrouver notre humanité, nous devons aider les autres à le faire.

En même temps, nous devons garder notre lucidité. C’est pourquoi j’ai envisagé cet exercice, non pour décourager les initiatives de ceux qui les portent mais pour les aider à passer sous le crible de la raison critique et sous la sanction expertale, des démarches, des actions, car nos erreurs stratégiques, ou la méconnaissance de l’environnement juridique, politique, diplomatique et sécuritaire, exploitées par nos adversaires, peuvent  porter préjudice aux autres dynamiques en cours et ruiner les espoirs d’un peuple avide de changement.

Dans cet ordre d’idées, promouvoir et diffuser une intelligence de la composition, qui est en réalité, la forme la plus raffinée et aboutie des intelligences, celle qui porte le monde, par opposition à une intelligence du clivage doit être la voie.

Ainsi perçu, la Résistance nourrit le processus Révolutionnaire, elle ne saurait s’y opposer, on ne doit pas les opposer. Si l’opposition souvent si proche du pouvoir au Cameroun semble confrontée à la malédiction de la dernière marche pour accéder au pouvoir, c’est justement à cause de ses faiblesses, de ses renoncements, de ses défections, de ses trahisons. Son défi à venir, c’est sa consolidation, c’est son renforcement suivant la théorie que j’avais énoncée, et qui fera l’objet de ma prochaine réflexion : TOO LARGE, TOO HIGH, TOO BIG, TOO HEAVY TO COLAPSE.

Amédée Dimitri TOUKO TOM

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