Dans un entretien à nous accordé, le chef Bazou a démonté pièce par pièce la mafia qui a conduit à l’existence de deux La’kam à la chefferie Bangou.
Je suis entrain de vous dire qu’en 1937 c’est le chef Bazou mon grand-père qui a procédé à l’arrestation du chef Sinkam Charles. En 1950, c’est toujours mon grand-père Nana qui a procédé à l’arrestation du chef Kemajou Paul Bernard. C’est le notable habilité à le faire Mbe Youkap qui avait remis les deux chefs à mon grand-père. Le peuple Bangou le sait, car l’histoire ne commence pas aujourd’hui. Dernièrement encore, c’est le successeur de Mbe Youkap qui m’a remis le successeur. Que celui qui peut nous apporter le contraire le prouve.
Majesté, pouvez-vous nous raconter l’histoire qui lie le peuple Bazou à celui de Bangou?
Je vous remercie sincèrement. Je vais déjà vous dire que Bazou a été créé par le Chipou du chef supérieur Bangou. Ne se sentant pas à l’aise,  il est allé créer la chefferie Bazou dont je suis le onzième chef de la dynastie. Je suis donc un chef lié à la chefferie Bangou depuis la création Bazou. Bangou serait parti d’une sous-chefferie dans le groupement Baleving dans la Menoua. Et le chef qui a créé Bangou n’est pas parti de la chefferie même, mais du village pour aller en aventure et venir créer la chefferie Bangou, d’où la naissance de notre géniteur.
Comment êtes vous arrivé au trône à Bazou?
Justement, quand mon père est décédé en 1984, c’est en réalité, sa majesté le chef supérieur Bangou qui devait venir m’installer, selon les us et coutumes. Mais malheureusement, celui qui était là c’est-à-dire le chef supérieur Tayo n’assurait que l’intérim. Donc il n’avait pas le droit de venir m’installer. Alors, c’est le conseil des 7 et des 9 notables, accompagné par les chefs Bamena et Bangoulap, qui sont venus m’installer au trône en 1984.  
En ce qui concerne la chefferie Bangou, je vais vous dire qu’en 1995,  quand j’ai reçu la visite de toute la cour royale à la chefferie Bazou, c’était pour venir me remettre les reliques du chef Paul Kemayou Bernard, qui est mort à Conakry. C’est à ce moment que j’ai compris qu’ il y avait problème à la chefferie Bangou.
Et à cette même période, jeune que j’étais, je ne pouvais pas me décider seul. Je suis allé voir les feux chefs Bamena et Bangoulap. Nous nous sommes dirigés à la chefferie Bangou pour aller restituer les restes mortuaires au chef supérieur Tayo, afin de procéder à l’inhumation comme on le fait normalement. Nous avons passé deux semaines de négociation, mais avec le chef Marcel Tayo s’est opposé.
Je me souviens qu’en 2001, l’arrêté préfectoral avait mis sur pied une commission chargée d’examiner et d’arrêter les modalités pratiques d’inhumation des restes mortuaires du chef Kemayou Sinkam Paul Bernard. Cette commission ayant à sa tête le préfet des Hauts-plateaux n’a pas pu mener sa mission à son terme, à cause du refus du chef Marcel Tayo qui s’est une fois de plus opposé énergiquement. Donc, depuis 1995 pour ne pas dire 2001,c’est moi qui détient les restes mortuaires du chef Kemayou Paul Bernard.
Quel était le problème?
Les raisons que le chef Tayo annonçait, étaient tout simplement que le chef Kemayou Bernard a été destitué, qu’il a été condamné à mort. Il avait oublié qu’en 1982, Paul Biya a pris le pouvoir, et en 1983, il a proclamé l’amnistie générale, et tous les chefs ont profité, y compris le chef Mayi Matip dans le Nyong-et-Kelle ; le chef Badenkop, le voisin direct de Bangou ; de Baleving ; même le chef supérieur Bazou, mon père. Donc, tous ont bénéficié de cette amnistie générale en 1983.
Ça veut dire qu’en 1985 quand le chef Kemayou Bernard est mort à l’étranger, il était plus en exil, puisqu’il avait déjà obtenu la grâce présidentielle. C’est pour cette raison qu’après avoir obtenu le décret présidentiel qui ordonnait le rapatriement du corps au Cameroun, et d’aller l’exhumer comme le veut notre coutume, la famille royale est venue me remettre le reste mortuaire.
En 2001, malgré les efforts de l’Etat on n’a jamais eu de suite favorable. Par conséquent, j’ai gardé le reste mortuaire de Paul kemayou Bernard pendant 25 ans.
Quelles étaient vos relations avec le chef Tayo?
Vous savez que c’est un véritable mystère. Vous connaissez l’histoire du Père, du Fils et du Saint-esprit. C’est ce qui se passe à Bangou. Parce que je n’ai pas compris l’inertie des populations, des notables et des élites Bangou. J’avais des relations avec lui parce que qu’il assurait l’intérim. Je n’ai pas eu de problème particulier avec le chef Tayo . Je sais une chose j’ai gardé le reste mortuaire pendant 25 ans jusqu’àu fatidique jour du 24 où j’ai interpellé les 9 et les 7 notables de la cour royale Bangou, quand j’ai su qu’on avait programmé la date des obsèques officiels, pour leur demander ce que je fais du reste mortuaire du chef Kemayou Paul Bernard.
Nous nous sommes entendus que le 24, ce reste sera inhumé au Panthéon des souverains Bangou.
…Avant ça il y a eu la réunion du 10 décembre…
…effectivement, lors de cette réunion que j’ai d’ailleurs appréciée, à sa juste valeur, avec le vice-président de l’Assemblée nationale Théodore Datouo, les forces vives, y compris le patriarche Nana Sinkam, trois commissions ont été formées: l’organisation de la réconciliation et une autre chargée de l’ arrestation du nouveau souverain. On devait restituer les travaux après deux semaines. Malheureusement, le préfet des Hauts-plateaux est décédé entre temps. Donc, on devait tout simplement surseoir les travaux, attendre qu’on enterre le préfet et nommer un nouveau, pour la poursuite des travaux. Le 24, j’ai remis le reste mortuaire en présence du sous-préfet de Bangou et de l’honorable  Théodore Datouo.
Après avoir gardé le reste mortuaire, j’ai donc ordonné que le lendemain,  on annonce le deuil c’est à dire le 25. On a alors annoncé deux deuils. Le deuil de sa majesté Kemayou Paul Bernard, mort en 1985, et celui de sa majesté Marcel Tayo, qui est mort en novembre. On a fait le tour du deuil et on a tapé le le successeur, tout ça en présence du sous-préfet de Bangou.
C’est à ce moment qu’on désigne le nouveau chef ?
Justement, je voudrais d’abord attirer votre attention sur le fait que le reste mortuaire de sa majesté Kemayou Paul Bernard a été inhumé au sanctuaire. Ce qui veut dire que ses propres fils étaient déjà éligibles, car leur père était chef. Pour cette raison et malgré la précipitation, le 28,  le notable qui était habilité à arrêter le chef et me remettre l’a fait. et il a choisi parmi les fils de Kemayou, parce que désormais, ses fils sont éligibles, car le corps de Kemayou repose au Panthéon des souverains Bangou.
C’est à ce niveau que les problèmes ont commencé ?
Si il y avait pas un floue à ce sujet, j’aurais souhaité, pour le simple fait que le préfet des Hauts-plateaux est mort, qu’on surseoit à cet événement, avec cette plaie dans la famille royale qui reste toujours ouverte.
Majesté, il se dit que vous n’avez pas qualité pour arrêter le nouveau chef à Bangou. Q’en dites-vous ?
Je suis en train de vous dire qu’en 1937, le chef Bazou mon grand-père a procédé à l’arrestation du chef Sinkam Charles. Et en 1950, une fois de plus, mon grand-père Nana à procédé à l’arrestation du chef Kemayou Paul Bernard. Contrairement à ce qui se dit aujourd’hui, c’est le notable Mbe Youkap qui avait remis ces deux chefs à mon grand-père. Le peuple Bangou connaît cette histoire, et j’attends la preuve contraire. Dernièrement encore, c’est le successeur du notable Mbe Youkap qui m’a remis le nouveau chef Bangou, descendant de sa majesté Kemayou Paul Bernard.
Ce notable était-il habilité à le faire ? D’aucuns pensent que non. Est-ce vrai ?
Qu’ils apportent la preuve contraire, car l’histoire Bangou ne commence pas aujourd’hui. J’aimerai vous poser une question pour éclairer l’opinion publique. Le chef Tayo qui est mort a succédé au chef Djomo. Et Djomo a succédé à qui? Je sais que Kemayou Paul Bernard a succédé à Sinkam. Djomo a succédé à qui? Parce que c’est de père en fils : expliquez nous ce mystère.
Quel est votre vœu, lorsqu’on sait que le pire est avenir avec ces deux La’kam à Bangou ?
Mon vœu le plus ardent, c’est de faire, comme par le passé, quand le corps était arrivé. Le gouvernement de la république avait demandé au préfet de réunir toutes les parties pour trouver une solution idoine. je pense que l’Etat du Cameroun doit nous aider à sortir de cette situation. Le gouvernement, à travers la légalité républicaine, doit mettre de l’ordre dans la famille royale régnante. 
Il est question que la famille royale se prononce. Ce n’est pas un problème des élites. A Batcham, par exemple, on avait décidé de mettre un collège de notables pour assurer la régence, en attendant qu’on trouve une solution. Le gouverneur, à travers le préfet, peut réunir toutes les familles Sinkam et Tayo pour les auditionner, et la solution va sortir. La solution ne va pas sortir des élites, encore moins des politiques. Sachez que les notables de la chefferie sont voués à la mort, parce qu’ils avaient déjà bu le cadi, au temps de feu Tayo, concernant son testament. Et quand on dit que le chef Tayo a fait 39 ans, il n’a pas fait 39 ans c’est faut. Il a fait 6 ans d’intérim de 1979 à 1985. Et à partir de 1985, si on venait enterrer le reste mortuaire de Kemayou Paul Bernard, il sortait de la chefferie. Cela veut dire qu’il devrait seulement faire 6 ans d’intérim et partir. Les autres 25 ans étaient illégales, car on devait taper le tam-tam et arrêter le successeur de Kemayou Paul Bernard. Voilà la vérité.
A la chefferie Bangou c’est Mbe Youkap qui est habilité à arrêter le nouveau chef pour remettre au chef Bazou. Du vivant du roi, il peut confier son secret aux 7 ou au 9 notables. Mais ce jour-là c’est Mbe Youkap qui arrête le nouveau chef.
Propos recueillis par Théodore Ntetmen

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